Jeudi matin, la pluie tombait drue sur les rues londoniennes. Rose, bien qu’elle aurait tué pour ne pas devoir le faire, devait sortir travailler. Réveillée déjà de mauvaise humeur par le bruit de la pluie qui tombait fort contre le rebord de sa fenêtre, produisant au passage un doux son métallique trop familier à son goût, son humeur ne faisait qu’empirer depuis le début de la journée. Une chance que sa mère n’ait pas été réveillée sinon ça aurait été le pompon. Oui, elle était retournée vivre chez sa mère, à peu près comme si le Doctor n’était jamais arrivée dans sa vie, au détail près d’ailleurs puisqu’elle avait reprit son poste de vendeuse dans le magasin qu’ils avaient reconstruits à la place de celui que le Doctor avait fait sauté lors de leur première rencontre. Elle avait prit sa douche – à l’eau froide – et avait renversé ses tartines par terre. Finalement, abandonnant la partie entre elle et le destin qui s’acharnait à lui pourrir la matinée, elle ne fit que boire son chocolat rapidement avant de filer au plus vite, voulant à tout prix échapper au discours habituel de sa mère qui se résumait en quelques mots « Tu devrais trouver un vrai job, espèce d’incapable. »

Elle prit le parapluie bleue qu’elle avait acheté étant adolescente et descendit quatre à quatre les marches de l’immeuble jusqu’à être dehors. Elle fit quelques pas dans la rue, comme pour vérifier par elle-même qu’il pleuvait bien, et finit par se résoudre à ouvrir son parapluie d’un air grognon. Elle aimait bien la pluie mais là, elle tombait un peu trop et si elle arrivait trempée au boulot, elle allait encore se faire engueuler. Au moins ça ferait changer sa mère de disque, au lieu de la traiter d’incapable, elle la traiterait de chômeuse. Heureusement que son père était là désormais quand même, il était plus indulgent avec elle, bien que toujours un peu dérouté d’avoir gagné ainsi une fille de 20 ans il y a deux ans. Ses écouteurs dans les oreilles, elle prit en tout cas le chemin vers son boulot et arriva devant le fameux magasin après avoir prit quelques correspondances du métro londonien.

Elle s’arrêta quelques instants devant le bâtiment, se remémorant comme quasiment chaque matin le jour de sa rencontre avec le Doctor. Probablement l’un des plus beaux jour de sa vie, ah ce qu’elle ne donnerait pas pour être avec lui dans le Tardis en ce moment même. Parfois elle se disait qu’inconsciemment, si elle avait reprit exactement le même travail qu’avant, c’était parce qu’elle rêvait encore qu’il reviendrait la chercher ici et qu’ils pourraient tout recommencer depuis le début. Elle soupira en se rendant d’à quel point elle était débile par moment et entra dans le magasin.

« Bonjour ! » mais sa phrase résonna dans le magasin sans qu’aucun écho poli ne vienne lui répondre. Visiblement elle était là en avance. La consultation de sa montre lui indiqua effectivement qu’à force de vouloir éviter sa mère elle avait finit par arriver au travail avec une petite demi-heure d’avance. Soupirant derechef elle posa ses affaires dans la pièce destinée à cet effet là et hésita quelques secondes sur ce qu’elle allait bien pouvoir faire. Elle avait bien une idée mais bon… Oh et puis au diable ! Elle ne pouvait pas se déprimer encore plus que ça après tout. Elle prit l’ascenseur pour se rendre au sous-sol de l’immeuble et retrouva quasiment les mêmes couloirs qu’il y avait quatre ans. Ils avaient reconstruits pratiquement le même bâtiment à vrai dire, il y avait même encore le fameux débarras où elle s’était faite agressée par les mannequins en plastique vivant. Ça tombait bien, c’était justement ça qu’elle cherchait…

Elle prit sa carte magnétique et ouvrit la porte. L’ambiance était exactement la même qu’il y a quatre ans, elle avait presque l’impression que c’étaient les mêmes mannequins aussi. Elle sentit presque le Doctor lui prendre la main et lui ordonner de courir pour sauver sa peau. Ce souvenir lui arracha même un sourire tandis qu’elle s’avançait dans la pièce toute en longueur. Elle passa délicatement ses doigts sur les mannequins à sa portée, soudainement envahie par un flot de souvenirs aussi agréable que douloureux. Peut-être avait-elle eut tort, peut-être qu’elle pouvait effectivement se déprimer encore plus qu’avant. Mais alors qu’elle était repartie dans une nouvelle séance de nostalgie elle entendit quelque chose tomber par terre à l’autre bout de la pièce et elle sursauta légèrement, sentant les battements de son cœur s’accélérer.

« Il y a quelqu’un ?! » Quelle question stupide à poser, mais même après ces années, ça restait un réflexe. Et puis, ses bons réflexes avaient été quelque peu rouillés depuis les quelques mois qu’elle travaillait ici. Elle s’avança prudemment vers la source du bruit, attrapant au passage une lampe torche pour éclairer le chemin. Elle arriva finalement au bout de la pièce et constata qu’il s’agissait d’un mannequin qui était tombé. Elle ne vit en revanche personne, au moment où elle allait repartir cependant, elle sentit quelqu’un poser sa main sur son épaule et se retourna brutalement en se retenant de hurler.

« Ah ! » Dit-elle en éclairant le visage de la personne ou de la chose qui l’avait trouvé. Il s’agissait en fait de Dorie, une collègue complètement abrutie qui ne savait rien faire de ses dix doigts.

« Désolée Rose, je ne voulais pas te faire peur, mais je suis tellement maladroite que j’ai fait tomber la moitié des mannequins par ici et je voulais pas que tu te moques de moi. » Rose soupira sans chercher à cacher son désespoir et dit finalement d’un ton plus gentil qu’elle ne serait crut capable d’employer vu son état de nerf :

« C’est rien Dorie, allez viens, je t’aide à ranger avant de remonter. »